Le Sarkophage, 15 janvier 2012.

Ce pouvoir « décomplexé » a osé contredire, en 2005, le résultat d’un référendum qu’il avait commandité, il détricote soigneusement et de plus en plus vite les acquis de décennies de luttes sociales pour les retraites ou les services publics, il vend à ses complices du privé les écoles, les hôpitaux, les trains et réduit la France des Lumières à devenir un marchand de nucléaire… Ce qui est nouveau n’est pas que le pouvoir privilégie certains intérêts, c’est qu’il leur soit entièrement dédié. Ainsi nos dirigeants qu’on désignait auparavant comme adversaires politiques sont devenus les ennemis du peuple. Mais, pour donner le change en évitant une rupture avec l’opinion, le pouvoir demande à la population d’exprimer son avis sur n’importe quel sujet : désormais, poser la question est devenu la fin en soi, et peu importe la réponse puisque la décision est prête, déjà mûrie dans les cercles « responsables » ! Alors on comprend mal qu’il se trouve encore des militants de bonne foi pour apporter leur caution au système, pour accourir quand le maître les siffle, pour s’appliquer à lui fournir des propositions bien argumentées. On peut excuser la naïveté des soutiers du Grenelle de l’environnement qui se sont jetés éperdument dans l’élaboration de solutions, souvent remarquables, lesquelles font aujourd’hui l’objet du plus grand mépris.... Mais pourquoi, si ce n’est que le leurre démocratique devient lui aussi un bizness, des associations continuent-elles d’aller au devant des souhaits du pouvoir jusqu’à lui proposer d’organiser des « procédures participatives » qui ne servent qu’à endormir le chaland ? La solution n’est pas dans les concertations et débats publics qui se font prendre pour de véritables participations*. Elle est nécessairement plus radicale comme l’indiquait George Contogeorgis, ancien ministre grec à propos du mouvement des indignés (Médiapart, 10 juin 2011) : « Ne nous berçons pas d'illusions. Les manifestations et rassemblements de protestation dans les rues et sur les places sont sans issue parce qu'ils ne s'attaquent pas à la cause du problème: la concentration monopolistique de la totalité du pouvoir politique entre les mains des détenteurs de l'État. Quand la société des citoyens, calmée ou épuisée, regagnera ses pénates, les hommes politiques continueront à discuter et co-décider avec les agents internes et externes des mécanismes dont ils sont les otages, à la surface de la politique (et qui les pourvoient en force, en argent, en communication, etc.)… En tout état de cause, la classe politique n'a aucune légitimité à dénier à la société des citoyens le droit de retirer, si elle le désire, sa confiance au système politique qui l'exclut de la participation à la procédure de prise des décisions ». L’humoriste Christophe Alévêque a bien exprimé le principe démocratique du néolibéralisme : « A quoi sert de violer les gens quand on peut les baiser ? » (Politis, 22 décembre 2011). Des élections périodiques comme nec plus ultra de la démocratie et des concertations comme dérivatifs entre deux périodes électorales, voilà la recette d’un système qui s’oppose aux intérêts des gens sans les violenter !