La Décroissance, septembre 2009

Les industries semencières agitent fortement leurs lobbies bruxellois pour faire passer 2 types de dispositions , apparemment sans lien avec la guerre qu’elles mènent depuis 15 ans pour imposer les plantes transgéniques (PGM). L’une concerne les plantes obtenues par mutagenèse « incitée » grâce à des chocs violents (chimiques, physiques, radioactifs) qui provoquent des modifications aléatoires du génome, dont parfois des traits supposés « favorables ». Ces plantes, qui sont des OGM selon la définition de la directive européenne 2001/18, génèrent les mêmes risques pour la santé et l’environnement que celles obtenues par trangénèse. Pourtant elles ont été miraculeusement exclues du champ d’application de cette directive, ce qui permet aux industriels d’éviter les évaluations des PGM… et les foudres des consommateurs. L’autre disposition permettrait de breveter des variétés issues de croisements traditionnels, le brevet étant une prérogative du propriétaire jusqu’ici réservée aux PGM (et donc aussi aux plantes mutantes). L’Office européen des brevets (OEB) est assailli de telles demandes : près de 500 en 2008 ! S’il répond favorablement, les compagnies privées pourront progressivement contrôler l’accès aux semences (prix, disponibilité, interdiction de ressemer,…). Ces manœuvres ne veulent pas dire que l’offensive des PGM est terminée, Pour preuve, les industriels ont fait pression sur le gouvernement mexicain et obtenu enfin (décret du 6 mars 2009) la culture de maïs transgénique dans ce pays. Il s’agit d’un « crime historique contre les peuples du maïs, contre la biodiversité et contre la souveraineté alimentaire, contre dix mille ans d’agriculture paysanne et indigène qui ont légué cette semence pour le bien commun de tous les peuples du monde » fustige justement une pétition qui souligne que les milliers de variétés présentes uniquement dans ce centre d’origine du maïs risquent d’être toutes polluées par l’introduction des transgènes. Pourtant ces offensives variées pour la propriété du vivant laissent penser que Monsanto et consorts ne misent plus exclusivement sur les PGM. Comme s’ils comprenaient enfin que leurs promesses aguichantes(PGM pour sols secs ou salés, productivité augmentée, résistances durables aux parasites,…) sont techniquement très aléatoires et socialement conflictuelles. Les stratégies nouvelles se veulent donc plus « naturelles » : trier l’existant, même s’il a été un peu forcé, plutôt que bricoler l’ADN… Nombre d’écolos se font peur avec les HGM (hommes génétiquement modifiés) comme si la technoscience pouvait réussir pour l’homme ce qui échoue pour le maïs ! Les faits récents indiquent plutôt que la « maîtrise du vivant » passera surtout par la sélection des meilleurs éléments parmi tous ceux disponibles, sans qu’on ne leur ait rien ajouté. Pour un usage moderne de cette stratégie de l’eugénisme classique, il suffit de multiplier les génomes en vue de les trier : par l’induction de mutations en tous sens chez les végétaux ou par la production massive d’embryons chez les animaux… ou chez l’homme !